Karl Prusik

Prusik, un nazi au camp de base !

Si le Prusik est rentré dans le langage courant des alpinistes, ce nom n’est pas si anodin. Au-delà du fait qu’il n’a probablement pas inventé le nœud en question, Karl Prusik était surtout particulièrement impliqué dans l’idéologie nazie.

Aujourd’hui au pied de l’Everest, les expéditions commerciales utilisent du matériel dernier cri. C’est une part non négligeable du budget de ces touristes des hauts sommets. Outil indispensable, le jumar. Une sorte de poignée devenue vitale pour se hisser le long de cordes fixes en sécurité. Mais avant la démocratisation de ce système, un étonnant nœud autobloquant faisait l’affaire. Ce nœud est une connaissance de base pour tout alpiniste. Il s’intègre dans plusieurs manœuvres de cordes, notamment dans des mouflages qui aideront à sortir des victimes d’une crevasse.

Son nom est connu de tous, le nœud de Prusik ou Prusik tout court. Il tire son nom de son supposé « inventeur », Karl Prusik. Il semble qu’un tel nœud était déjà utilisé depuis des décennies par les marins. Le nœud lui était donc sans doute antérieur. Mais c’est lui qui l’a importé dans l’univers de l’alpinisme grâce à une publication de décembre 1931. Parue dans le journal du Club Alpin Autrichien, l’article s’intitulait « un nouveau nœud et ses applications ». Signé par Karl Prusik.

Prusik et l’idéologie nazie

Cet alpiniste d’origine autrichienne, qui fut Président du Club Alpin Autrichien, ouvrit des voies sur le Planspitze, le Kleine Buchstein ou dans les Dolomites. Des montagnes modestes qui ne font pas de lui un alpiniste d’élite dont l’Histoire est friande. C’est bien son nœud qui a fait sa notoriété. Si bien qu’en 1948, quand Fred Beckey grimpe avec Art Holben dans les North Cascades, il nomme Prusik Peak une montagne qu’il est le premier à gravir. Pas d’hommage à la carrière de Karl Prusik, mais bien à son nœud indispensable à cette ascension. Sur la fin de la montée, impossible pour les deux hommes d’atteindre le sommet. Ils furent contraints de former un lasso avec leur corde pour l’accrocher plus haut. Et se hisser grâce à un Prusik jusqu’au sommet.

Au-delà de son nœud, et de sa carrière de professeur de musique, Karl Prusik était un défenseur du darwinisme social. Lieutenant de 1915 à 1918, il voyait dans l’alpinisme un bon moyen de se préparer à la prochaine guerre. Indispensable revanche à ses yeux. Convaincu de la supériorité de sa culture teutonique, il s’impliquait dans des clubs de montagne qui devinrent vite des antichambres du recrutement militaire. Il y prônait une ségrégation homme-femme. Les juifs, eux, étaient d’ores et déjà bien souvent tenus à l’écart de ces clubs et des refuges qu’ils géraient.

Les historiens sont partagés sur l’antisémitisme de Prusik, mais il était un cadre important de clubs qui étaient ouvertement anti-juifs. Son implication corps et âme dans le Club Alpin National Socialiste avant d’être enrôlé dans la Wehrmarcht pendant la guerre 1939-45 complète le tableau. Prisonnier de guerre, il fut libéré deux ans après la fin du conflit. Et reprit la direction adjointe du Club Alpin Autrichien. Il est mort en 1961.

Illustration © Georg Fayer

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Arnaud P

Passionné par l'univers de la montagne sous tous ses aspects, Arnaud est membre de la rédaction d'Altitude.News ! Originaire du sud de la France, ça ne l'a pas empêché de s'installer un temps en Savoie ! Il écrit des articles dans les catégories : Alpinisme, Rando/Trek, Business et Nature. Pour le contacter directement : arnaud@altitude.news !

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