Des tentatives eurent lieu pendant plusieurs décennies dès le début du XXème siècle. Mais la première ascension de la face nord des Grandes Jorasses date de 1935. Qui étaient les alpinistes victorieux ?
Martin Maier et Rudolf Peters. Deux jeunes allemands. Si leurs noms vous sont inconnus, ils ont pourtant écrit une page majeure de l’histoire de l’alpinisme. Le 29 juin 1935, ils réalisaient la première ascension de la face nord des Grandes Jorasses . Une des faces les plus convoitées des Alpes, l’une des trois grandes faces nord avec l’Eiger et le Cervin. Encore le théâtre aujourd’hui d’exploits alpinistiques.
Au pied de la paroi, Peters écrivait : « nous nous sommes assis délibérément devant cette face nord froide et hostile, sur le point de mener un combat peut-être sans espoir. (…) Nous n’avons rien voulu d’autre. Depuis des années nos esprits et nos volontés et tous nos désirs sont tendus vers cette muraille. Pour nous, elle est le mur des murs ». Ce n’était pas la première tentative de Peters. Un an plus tôt, il était au pied de cette même montagne, avec un autre camarade. Rudolf Haringer.
1934, la chute d’Haringer
Après un premier bivouac dans la face, les deux hommes progressèrent péniblement mais surement. Un second bivouac fut nécessaire et l’ascension se poursuivit jusqu’à l’orage qui éclata à la mi-journée du troisième jour. Il n’était pas question que cela dure, les vivres étant d’ores et déjà épuisées. Pourtant la météo ne voulait pas se calmer. Le vent redoublait, et avec lui la neige. Les flocons fouettaient l’abri des deux alpinistes.
Ils prirent la décision de descendre en rappel dans le mauvais temps. Des heures durant, les jeunes grimpeurs progressèrent laborieusement vers le bas. Et la nuit finit par arriver. Haringer, bien décidé à sonder un emplacement pour un énième bivouac, se détacha de la corde. Quelques secondes plus tard, il chuta sur près de 500 mètres. Peters eut beau appeler, personne ne répondit. Il continua la descente tant bien que mal, abattu par la disparition de son ami et éreinté par l’ascension en cours dans des conditions plus que délicates.
1935, la revanche de Peters
Fin juin 1935, Rudolf Peters est de retour à Chamonix. Le 28 à 16h, l’ascension débute. Le premier bivouac est le même que l’année précédente. Mais les conditions sont bien meilleures. La distance couverte durant la deuxième journée en 1934 est là avalée en quelques heures seulement. Des chutes de pierres manquent de faire tourner cette nouvelle tentative à la catastrophe. Maier est blessé mais il peut continuer. Il ne leur faut que quelques heures pour dépasser la localisation du demi-tour de l’année précédente. Et après un peu de repos, ils peuvent aller au bout. Le sommet est atteint vers 20h, le 29 juin. Bivouac au sommet avant descente le lendemain. La voie classique de la face nord des Grandes Jorasses via l’Eperon Croz est vaincue. Deux autres cordées s’élancent dans la foulée et l’ascension se répète le lendemain avec Giusto Gervasutti, Renato Chabod, Raymond Lambert et Loulou Boulaz.
Illustration © [B&W] RobinL~commonswiki CC BY-SA 3.0, via Wikimedia Commons