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Simone Moro et son monde en voie de disparition

Tout a commencé dans les Dolomites où Simone grimpait adolescent sous les encouragements de son père. Enfant, il était assez solitaire, sa mère expliquait en janvier à Climbing.com : « il n’avait pas grand-chose en commun avec les autres enfants, il n’avait pas de chanteur ou de joueur de foot favori… il avait Messner ! ». A 20 ans, Moro intègre l’équipe italienne d’escalade. Cinq ans plus tard, il découvre l’Himalaya.

Quand l’italien originaire de Bergame (comme Bonatti !) pose le pied au sommet de l’Everest en 2000, il a déjà réalisé des ascensions aux 4 coins du monde. Mais ce n’était que le début d’une carrière incroyable.

Le roi des hivernales

Alors que les principaux sommets himalayens accueillent désormais des dizaines d’expéditions commerciales, Simone Moro tente de retrouver les montagnes des premiers explorateurs. « C’est pour profiter encore d’un monde en voie de disparition, à savoir une chaîne himalayenne encore recouverte de neige. Tu te retrouves seul, plus personne autour de toi : pas de trekkeurs, pas d’alpinistes. » affirmait-il lors d’une interview pour Redbull.com en 2014. Et il s’est fait une véritable spécialité dans la discipline. Il détient aujourd’hui le record de 4 sommets de plus de 8.000m gravis en Hiver.

En janvier 2005, il atteint la cime du Shishapangma avec le polonais Piotr Morawsky. Quelques semaines plus tôt, le Français Jean-Christophe Lafaille réalisait un exploit similaire mais c’était encore l’automne ! Querelles de calendriers. En février 2009, il se paye le Makalu. C’est en faisant la même tentative trois ans plus tôt que Lafaille disparaissait. Là où Lafaille tenta l’ascension en solitaire, Moro grimpe avec le Kazakhe Denis Urubko. Même cordée à laquelle se joint l’Américain Cory Richards en 2011 pour faire face aux 8.035m du Gasherbrum II.

Enfin en 2016, c’est au tour du Nanga Parbat de tomber entre ses mains.

Entre ces réussites, de nombreuses tentatives. Notamment au Broad Peak où il tente deux fois sa chance, en vain. C’est une équipe polonaise qui réussira avant lui. Et c’esy peut-être une expédition polonaise qui réussira le K2 à sa place ! Du reste, il ne compte pas y aller. Sa femme le lui interdit depuis un rêve où elle le voyait mourir au K2 : « je ne suis pas assez stupide pour aller vérifier si c’était un rêve prémonitoire ou non ! ».

Il a réussi là où 30 expéditions ont échoué !

En février 2016, avec le basque Alex Txikon et Ali Sadpara, un porteur pakistanais, il atteint le sommet du Nanga Parbat. L’un des derniers sommets de 8.000m inviolé en hiver. C’est une première sur un itinéraire périlleux sur lequel de nombreuses expéditions ont échoué. Lui-même a du s’y reprendre à 4 reprises. En 2011 et 2014, il avait échoué en plein hiver. Au printemps 2003, il jette l’éponge à 7.100m. Pendant que le français Jean-Christophe Lafaille ouvrait une nouvelle voie. Mais ce n’était déjà plus l’hiver.

En 2016, il part pour une nouvelle tentative avec sa compatriote Tamara Lunger, une grimpeuse transalpine au palmarès trop méconnu. Leur itinéraire initial se révèle trop dangereux, les séracs sont menaçants. Ils fondent alors leur équipe dans une autre, celle d’Alex Txikon qui ciblait une autre voie. Ensemble, ils parviennent au sommet de la « Montagne Nue ». Lunger restera quelques dizaines de mètres sous le sommet, trop malade pour ne pas mettre en péril toute l’équipe si elle allait au bout.

Une vie d’athlète de haut niveau et secouriste de l’extrême

Simone Moro mène une vie d’ascète pour réussir ses exploits « Je n’ai jamais pris une cuite, ni fumé une cigarette de toute ma vie, je ne me suis jamais couché à l’aube à cause d’une bringue, et je me suis toujours entraîné comme si l’alpinisme était une discipline olympique, en grimpant sur rocher et sur glace, bien sûr, mais aussi en courant 100 à 140 kilomètres par semaine, soit un semi-marathon presque tous les jours. » confiait-il au Monde en 2016.

Mais ce n’est pas sa seule occupation. Depuis quelques années, il a monté une petite équipe de secours basée au Népal. Avec un hélicoptère, des pilotes et des techniciens, il participe à la réalisation de secours à des altitudes particulièrement hostiles. En 2012, il réalisait un sauvetage à 6.400m en face Nord du Teng Kang Poche. En mai 2013, son équipe récupérait un blessé à 7.800m  sur les pentes de l’Everest. Un record inégalé.

 

Simone Moro a aujourd’hui 50 ans et continue de faire des projets en haute altitude… et en hiver ! Au printemps dernier, il avait retrouvé Tamara Lunger pour une tentative de traversée du Kanchenjunga avec 4 sommets à plus de 8.000m et une distance de plus de 5km à parcourir dans la « zone de la mort ». Cette entreprise s’était soldée par un échec… mais Simone Moro n’a pas dit son dernier mot…

 

Illustration : © Associazione Amici di Piero Chiara

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Arnaud P

Passionné par l'univers de la montagne sous tous ses aspects, Arnaud est membre de la rédaction d'Altitude.News ! Originaire du sud de la France, ça ne l'a pas empêché de s'installer un temps en Savoie ! Il écrit des articles dans les catégories : Alpinisme, Rando/Trek, Business et Nature. Pour le contacter directement : arnaud@altitude.news !

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